Je suis ébahie par la taille des nouvelles poussettes. On ne
fait pas plus encombrant, presque pire que les landaus Silver Cross des années
50. Dans ma cervelle étroite, une poussette moins ça tient de place, plus c’est
pratique, mieux c’est. L’arrivée des premières poussettes-cannes sur le marché
a, à l’époque, changé ma vie de mère de famille. Une fois de plus, je n’y suis
pas. La maxi-poussette est un marqueur social. Elle est généralement pilotée,
pendant le week-end, par le père, un bobo largement trentenaire voire
quadragénaire. Il clame ainsi sur la place publique : « Je suis un
homme, un vrai, j’ai engendré. Mais pas comme vous autres pauvres mecs, moi
j’ai une autre idée de la paternité. » Laquelle, on se demande. Il y a
toujours des gens pour réinventer l’amour, la famille et le mariage. En tout
cas je parierais que le véhicule familial est un 4x4.
Grain de poivre
Faut-il attribuer la taille de la poussette au père ou à celui qui les conçoit ?
Qu'y a-t-il dans l'esprit de ce dernier ?
L'envie de confort pour l'enfant - bon calage, bonne suspension, solidité de la toile, robustesse - ou l'envie d'élever le père au statut décrit par Grain de Poivre ?
Veut-il dans ce cas semer dans l'esprit du père l'idée qu'avec une poussette pareille, il peut avoir plusieurs enfants puisqu'il a un matériel solide ? Induire l'idée de la famille nombreuse qui lui donnera de nombreux petits-enfants avec une poussette toujours aussi vaillante ? Veut-il alors aussi lutter à sa façon contre le gaspillage et participer au mouvement écologique par l'une des actions dont il est responsable ? Qui le sait ?
Je n'irai pas plus loin dans mes élucubrations puisque je ne suis certaine de rien.
En revanche, si je devais concevoir un matériel de puériculture, je suivrais mon instinct : une poussette dos à la route pour que l'enfant tout petit puisse regarder le visage de sa mère (ou de son père !)qui pourrait ainsi voir s'il a sommeil, s'il a peur, s'il est incommodé, s'il est temps de l'allonger, s'il a froid... De même, je concevrai un lit qui soit un vrai lit où l'on puisse encore le bercer pour l'aider à s'endormir paisiblement et non un lit-parc grillagé tout-en-un dans lequel l'enfant ne sait plus s'il doit jouer ou dormir... Il me semble que l'on oublie trop souvent qu'un petit doit vivre dans un monde à sa mesure et qu'il ne sert à rien de le propulser si rapidement dans le monde des adultes où la vitesse et la performance sont tellement recherchées que je me demande parfois pourquoi on a voulu des enfants !
Quand l'impatience et le pratico-pratique me guettent, je me répète que pour lacer les souliers d'un petit, je dois souvent m'agenouiller, que je le veuille ou non ! A genoux devant un enfant, cela me remet vite à ma place !
Rédigé par : Jacqueline Decoux Ricour | 08 octobre 2007 à 23:05