En cette saison, c’est un rituel, je cuis mes foies, mes
foies gras bien sûr. Je suis allée les chercher chez une dame dont j’ai éprouvé
la production. Car le problème du foie est la fonte. Un foie de mauvaise
qualité (palmipède gavé trop vite, entassé, stressé) peut rendre plus de
graisse qu’il ne reste de viande. Ces foies finissent généralement dans les
conserveries où on les hache pour faire un cylindre homogène ce qui aux yeux d’un
public non averti est plus présentable que les lunes que forment les tranches
des lobes d’un foie entier. Dans une deuxième étape, on prépare les foies :
on enlève le réseau de nerfs, on sale, on poivre, on introduit dans le bocal,
on dégraisse soigneusement le bord, on pose la capsule, on visse le couvercle.
On range les bocaux sur la paillasse et on contemple, c’est beau. Puis vient la
cuisson. Une grande bassine, un trépied à gaz, des torchons et des briques pour
le calage. On recouvre d’eau, on fait bouillir pendant une heure et
demie. Et on attend que ça refroidisse pour voir le résultat : ont-ils
rendu de la graisse ? Ouf, il y aura juste de quoi cuire des pommes
sarladaises. Ensuite, le plaisir continue avec l’édition et la pose des
étiquettes suivie d’un bel alignement sur une étagère. Six mois plus tard, on
peut enfin savourer. Mais comme le vin, le foie gras est encore meilleur
quand il a vieilli. La patience est récompensée : au bout de trois ans, c’est
un régal exceptionnel.
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